Des origines à l’Empire inca, dans l’histoire du Pérou, les premières traces de présence humaine datent d’il y a au moins 20 000 ans avant notre ère, mais très peu de vestiges de cette époque ont été conservés. À partir de 1250 av. J.-C., plusieurs civilisations venues du nord, les Chavíns, les Chimús, les Nazcas et les Tiahuanacos s’établissent dans la région.
Le Pérou
La ville de Chanchan, dont les ruines sont encore visibles aujourd’hui, a été construite par les Chimús vers 1000 apr. J.-C. Capitale du peuple précolombien Chimú, Chanchán (ou Chan Chan, aujourd’hui site archéologique de la côte Pacifique du Pérou) est un immense complexe urbain de la période postclassique, construit en adobe ; d’une superficie d’environ 20 km², la cité était composée de dix districts, connus sous le nom de ciudadelas. À son apogée, vers le XIIIe siècle, elle était peuplée de quelque 20 000 habitants.
Chanchán, prise par les Incas en 1470, a été inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco en 1986.
Les Incas, une tribu guerrière du sud de la sierra, se déplacent peu à peu vers le nord de la région jusqu’à la vallée fertile de Cuzco entre 1100 et 1300. Leur expansion commence en 1438, avec Pacahuetec, qui entreprend de conquérir les terres voisines. Vers 1500, l’Empire inca s’étend de l’océan Pacifique jusqu’aux sources du río Paraguay et du fleuve Amazone, de la région de l’actuelle Quito, en Équateur, jusqu’à la rivière Maule, au Chili. Ce vaste empire est dirigé par un inca, ou empereur, qui est adoré comme une divinité. Riche en gisements d’or et d’argent, le royaume des Incas va devenir la cible des ambitions impériales des Espagnols déjà installés au Panamá.
La conquête espagnole
En 1779, Don Baltasar Martínez Compañón y Bajanda est nommé par la Couronne espagnole évêque de Trujillo, une petite ville côtière du Pérou. L’ecclésiastique s’enthousiasme en découvrant ce Nouveau Monde et, entre 1782 et 1785, prend note et dessine avec candeur de tout ce qu’il peut observer depuis son diocèse : la nature, l’architecture, la vie quotidienne et particulièrement les danses et fêtes indigènes. Son codex, dit le Trujillo del Perú, est ainsi illustré d’aquarelles caractéristiques de l’art colonial espagnol en Amérique latine.
En 1531, le conquistador espagnol Francisco Pizarro débarque au Pérou avec 183 hommes et, utilisant la guerre civile qui divise les Incas, réussit en moins de cinq ans à faire de leur empire une possession espagnole. En 1535, il fonde sur les bords de la rivière Rímac une ville dont il fait sa capitale, Ciudad de los Reyes (la « cité des Rois »), aujourd’hui Lima. Les conflits d’autorité qui opposent bientôt les conquérants espagnols entre eux débouchent sur l’assassinat de Pizarro.
En 1542, Charles Quint, dans le but de rétablir l’ordre, crée la vice-royauté du Pérou, qui englobe toutes les possessions espagnoles d’Amérique du Sud, à l’exception de l’actuel Venezuela. De « nouvelles lois » sont promulguées, afin de tenter de protéger les Indiens des violences de l’exploitation des conquistadores. Mais le premier vice-roi espagnol, Nunez de Vela, arrivé au Pérou en 1544, suscite une vive hostilité de la part des colons qui se rebellent et le tuent : les « nouvelles lois » ne sont jamais appliquées.
C’est avec l’arrivée, en 1569, du vice-roi Francisco de Toledo, que le système colonial, qui allait prévaloir pendant plus de deux siècles, se met véritablement en place. Il entreprend l’intégration de la population indienne, groupée en communautés agricoles, placées sous la tutelle d’un particulier ou de l’État, et favorise son évangélisation. La période qui suit est particulièrement prospère, les Espagnols introduisent sur les premiers plateaux andins de nouvelles cultures (blé, vigne, olivier) et se mettent à cultiver la canne à sucre dans des plantations côtières, en important des esclaves. Cependant, la véritable richesse du Pérou se trouve dans son sous-sol qui recèle de nombreux métaux précieux, et en particulier l’argent (gisement du Potosí) qui donne au pays un rôle prépondérant dans la production mondiale jusqu’au XVIIIe siècle. À partir de 1630, cependant, une phase de déclin de la production s’amorce, provoquant une longue dépression économique. Dans ce contexte de marasme économique et social, des aspirations à l’indépendance vont bientôt voir le jour.
L’indépendance du Pérou (1821)
Le 28 juillet 1821 à Lima, le général argentin José de San Martín proclame l’indépendance du Pérou et reçoit le titre de protecteur qu’il abandonne au profit de Simón Bolívar. Néanmoins, l’émancipation définitive des territoires péruviens ne survient qu’en décembre 1824, alors que la victoire d’Ayacucho met fin à la domination espagnole sur le continent sud-américain.
En 1780, 60 000 Amérindiens, menés par José Gabriel Condorcanqui (qui adopte d’ailleurs le nom de son ancêtre, l’inca Túpac Amaru), se révoltent contre l’autorité espagnole. L’insurrection est écrasée en 1781 et Condorcanqui est exécuté, de même que des milliers de ses camarades révolutionnaires. En 1814, une autre révolte est à son tour réprimée ; pourtant, l’opposition à l’autorité impériale gagne toute l’Amérique du Sud espagnole.
En septembre 1820, José de San Martín, un Argentin qui a battu les forces espagnoles au Chili, débarque avec ses troupes au Pérou. En juillet 1821, il entre dans la ville de Lima, insurgée. L’indépendance péruvienne est proclamée le 28 juillet 1821 et San Martín reçoit le titre de Libertador (Libérateur). Mais il est rapidement évincé par Simón Bolívar, le héros de la révolution vénézuélienne, qui entre au Pérou en 1822, et met en déroute l’armée espagnole en 1824, lors de la bataille de Junín, le 6 août, et de la bataille d’Ayacucho, le 9 décembre, avec l’aide du général Sucre.
Les années suivantes sont extrêmement chaotiques. Une fois Bolívar parti pour la Grande-Colombie en 1826, le pays passe sous le joug des propriétaires fonciers et de la dictature militaire. Le Pérou ne connaît pas la paix avant 1845, lorsque Ramón Castilla, un vétéran d’Ayacucho, s’empare de la présidence. Durant ses deux mandats (1845-1851 et 1855-1862), il entreprend de nombreuses réformes : abolition de l’esclavage, adoption, en 1860, d’une Constitution libérale, construction de voies ferrées. Castilla commence également à exploiter le guano et les riches gisements de nitrate. En 1864, cette exploitation est à l’origine du conflit qui débouche sur une guerre entre le Pérou et l’Espagne, après que cette dernière s’est emparée des îles Chincha, riches en guano. Allié à l’Équateur, à la Bolivie et au Chili, le Pérou en sort victorieux et le traité de 1879, qui mettait fin à la guerre, est l’occasion de voir pour la première fois sa souveraineté officiellement reconnue par l’Espagne.
De la guerre du Pacifique à la Seconde Guerre mondiale (1879-1945)
Entre 1879 et 1883, la guerre du Pacifique oppose le Pérou au Chili au sujet du contrôle de la province de Tarapaca, riche en nitrates. Battu et amputé d’une partie de son territoire, ruiné par des années de guerre et les dissensions internes, le Pérou tente alors de se réorganiser.
La reconstruction est lente et se fait en grande partie avec l’aide des capitaux étrangers, sous la présidence d’Augusto Leguía y Salcedo. Après son premier mandat (1908-1912), il prend à nouveau le pouvoir en 1919, à la faveur d’un coup d’État militaire, et exerce une autorité quasi dictatoriale. En 1924, alors qu’il est au pouvoir, des intellectuels péruviens exilés fondent l’Alliance populaire révolutionnaire américaine (APRA), un mouvement de tendance marxiste, influencé par la révolution mexicaine. L’APRA, qui exige des réformes fondamentales contre l’oligarchie conservatrice est rapidement interdite par Leguía, ce qui ne l’empêche pas de devenir un parti politique extrêmement influent.
Dans les années 1930, malgré l’adoption d’une Constitution démocratique (1933), l’APRA est l’objet d’une sanglante répression et les élections qui lui donnent la victoire sont annulées. La présidence revient alors à Manuel Prado Ugarteche, qui veut poursuivre la modernisation du pays, mais doit également compter avec la puissante volonté réformiste, initiée par l’APRA.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Pérou n’apporte qu’un soutien limité à la cause des Alliés. Il rompt les relations avec les puissances de l’Axe en janvier 1942, mais ne déclare la guerre à l’Allemagne et au Japon qu’en février 1945, et adhère alors à la charte des Nations unies.
Alternance de dictatures et de gouvernements démocratiques (1945-1980)
En 1945, une coalition de partis libéraux et de gauche, dont l’APRA, permet l’élection de José Luis Bustamante Rivero, un réformateur, à la présidence de la République. Les droits civils et la liberté de la presse sont renforcés, et certains pouvoirs dictatoriaux du Président sont abolis par amendement constitutionnel. En butte à l’hostilité de l’oligarchie conservatrice, Bustamante est renversé en 1948 par les militaires qui mettent l’APRA hors la loi.
Le 2 juillet 1950, le général Manuel Arturo Odría, l’instigateur du coup d’État de 1948, est élu à la présidence et son gouvernement renforce le système de défense du Pérou, lance un vaste programme de travaux publics, et favorise une plus étroite coopération avec le Brésil, grâce à une série de pactes économiques et culturels.
L’élection de 1956 marque le retour du président Prado Ugarteche au pouvoir et le renouveau des réformes libérales. En mai 1960, la situation économique s’améliore et les capitaux étrangers entrent au Pérou, sous forme de prêts et de contrats de développement. En octobre de cette même année, le gouvernement décide de nationaliser progressivement la plupart des sites de production pétrolière. En 1962, dans un contexte de fraude électorale, l’armée annule les élections et se pose en garante de la légalité constitutionnelle. Le président Prado est déposé. L’élection de 1963 permet le retour à la démocratie, avec la victoire de Fernando Belaúnde Terry. Celui-ci est cependant évincé en octobre 1968, la Constitution est suspendue et une junte militaire s’installe au pouvoir, sous la direction du général Juan Velasco Alvarado.
Au début des années 1970, le gouvernement de Velasco entreprend à son tour une réforme radicale du système économique et social : saisie des terrains d’élevage appartenant à des intérêts étrangers, contrôle des prix sur les biens et services fondamentaux, vaste réforme agraire. L’industrie de la pêche d’anchois, sérieusement mise à mal en 1972, en raison de modifications des courants océaniques, est nationalisée en 1973. Le budget de 1973 à 1974 prévoit une augmentation de 35 p. 100 des dépenses pour le développement et la diversification de l’industrie privée. Parallèlement, en juin 1973, la Banque mondiale augmente les crédits destinés au Pérou de 470 millions de dollars.
Après une série de grèves et de manifestations organisées pour exprimer l’insatisfaction populaire vis-à-vis du président Velasco, un nouveau coup d’État militaire renverse le gouvernement péruvien, en août 1975. Le général Francisco Morales Bermúdez, qui avait été Premier ministre et ministre de la Guerre sous Velasco, devient président. Son gouvernement annonce que le pays retournera à la démocratie en 1980. Cependant, et en réponse à l’agitation sociale qui se développe à cause de l’augmentation vertigineuse du coût de la vie, l’état d’urgence est proclamé.
Le retour à la démocratie (1980)
À partir de 1980, le Sentier lumineux péruvien (en espagnol, Sendero Luminoso) mène une campagne de guérilla contre le gouvernement péruvien. Mouvement révolutionnaire maoïste, recrutant ses troupes dans les communautés indiennes, il lutte par l’action violente.
En 1980, comme promis, une élection présidentielle est organisée. Le vainqueur, l’ancien président Belaúnde Terry, ne parvient pas à redresser la situation économique. Pendant les cinq années qui suivent, le revenu par habitant diminue, et la dette extérieure du pays augmente. Par ailleurs, les guérilleros maoïstes du Sentier lumineux (Sendero luminoso) intensifient leurs actions. Cette guérilla provoque, en tout, la mort d’au moins 18 000 personnes. Lors de l’élection présidentielle de 1985, la victoire — pour la première fois dans l’histoire du pays — du candidat de l’APRA, âgé de 36 ans, Alan García, constitue un véritable événement, mais elle ne parvient pas à inverser la tendance et son mandat est jugé catastrophique. Le déclin économique du pays se poursuit, l’inflation atteint 7500 p. 100 en 1990, la pénurie grandit tandis que corruption et clientélisme sont la règle.
Les présidences d’Alberto Fujimori (1990-2000)
Né au Pérou en 1938, dans une famille d’immigrants japonais, Alberto Fujimori a été élu président de la République en 1990, puis en 1995. Il est l’artisan de la politique ultralibérale menée au Pérou dans les années 1990.
En 1990, les élections présidentielle et législatives sont dominées par les candidats du mouvement Changement 90 – Nouvelle majorité (C90), fondé en 1989 et marqué par la personnalité d’Alberto Fujimori, du Front démocratique (Fredemo), une coalition de centre créée en 1988, ainsi que de l’Alliance populaire révolutionnaire américaine (APRA) de tendance marxiste, fondée en 1924. Au mois de juin 1990, Alberto Fujimori, fils d’immigrés japonais et ingénieur agronome, succède à Alan García à la présidence de la République. À la surprise générale, il est élu au second tour avec 62,5% des suffrages devant le candidat du Fredemo, l’écrivain Mario Vargas Llosa.
Le nouveau président impose un programme d’austérité afin de combattre l’hyperinflation (1 000% en 1988-1989). La crise économique provoque cependant une nouvelle escalade des actions de la part du Mouvement Túpac Amaru (MRTA) et du Sentier lumineux, qui déplace son champ d’action vers Lima et commence à viser les infrastructures administratives. En avril 1992, invoquant le terrorisme et la corruption dans les milieux gouvernementaux, le président suspend la Constitution et prononce la dissolution du Congrès. En septembre, l’arrestation d’Abimaël Guzman, le chef du Sentier lumineux, permet au chef de l’État de conserver le soutien de la population.
Alberto Fujimori, sur la crise des otages à Lima
Entre 1990 et 2000, le Mouvement Révolutionnaire Túpac Amaru (MRTA) conteste le régime du président péruvien Alberto Fujimori. Du 18 décembre 1996 au 22 avril 1997, un groupe se réclamant de ce mouvement prend en otage les membres de l’ambassade du Japon à Lima. Le président Alberto Fujimori (que l’on entend ici s’exprimer sur l’affaire) dirige personnellement l’opération qui permet la libération de 71 des 72 otages le 22 avril. L’assaut entraîne en effet la mort d’un des otages et de deux soldats du commando. Les quatorze membres du MRTA sont exécutés.
Une Assemblée constituante est élue en novembre 1992. Elle élabore une révision de la Constitution qui permet au président de la République sortant de se présenter pour un second mandat consécutif. La nouvelle Constitution est adoptée par référendum en octobre 1993.
De nouvelles élections sont alors fixées pour 1995. Alberto Fujimori est réélu triomphalement le 9 avril, dès le premier tour, avec 64,42% des suffrages, devant Javier Pérez de Cuéllar, secrétaire général de l’ONU de 1982 à 1991. Mais le danger terroriste subsiste. Il se manifeste une nouvelle fois du 18 décembre 1996 au 22 avril 1997, lors d’une prise d’otages à l’ambassade du Japon par un groupe se réclamant du Mouvement Túpac Amaru.
Fin de la prise d’otages à Lima
Le président du Pérou, Alberto Fujimori, fait un signe de victoire, le 22 avril 1997, après l’intervention d’un commando pour libérer les otages retenus dans l’ambassade du Japon depuis décembre 1996 par le mouvement révolutionnaire Túpac Amaru. Le raid a entraîné la mort d’un des otages et de deux soldats du commando. Les quatorze membres du MRTA ont été exécutés.
En politique étrangère, un différend frontalier ressurgit entre le Pérou et l’Équateur, en janvier 1995, au sujet du contrôle de la cordillère du Condor. Cette zone, longue de 78 km, presque inhabitée, mais riche en gisements pétroliers, avait été attribuée au Pérou en 1950, après arbitrage international. Cependant, l’Équateur, qui n’a jamais accepté cette décision, déclenche les hostilités. Les combats se poursuivent jusqu’à la mi-février, faisant quelque 200 morts et blessés de part et d’autre. En mars, deux accords de cessez-le-feu sont finalement signés, sous l’égide des pays du Protocole de Rio (États-Unis, Brésil, Argentine, Chili), prévoyant la démilitarisation de la zone et l’organisation de négociations pacifiques entre les deux pays. En octobre 1998, les deux pays signent à Brasilia (Brésil) un accord de paix, suivi en mai 1999 de la démilitarisation de la zone et d’accords de coopération bilatérale.
Grâce à une politique ultralibérale appuyée par le Fonds monétaire international (FMI), le Pérou semble sorti de la crise ; mais le coût humain en est très élevé : chômage et marginalisation d’une partie importante de la population, importance croissante du trafic de drogue dans l’économie.
En 2000, en dépit de la Constitution qui autorise seulement deux mandats successifs, le président Fujimori brigue un troisième mandat à l’élection présidentielle. Malgré 1,5 million de signatures, la proposition de tenue d’un référendum visant à empêcher sa candidature est rejetée par le Congrès. Face au candidat indien Alejandro Toledo, et malgré le monopole qu’il exerce sur les médias, Alberto Fujimori est contraint de concéder un second tour. Mais son adversaire, n’obtenant pas un report permettant une campagne honnête, refuse de participer au scrutin. Alberto Fujimori est donc élu, mais l’élection est contestée dans le pays comme à l’étranger.
En novembre 2000, à la suite d’un scandale politico-financier impliquant le chef des services de renseignement (SIN), un des proches conseillers du président, et la révélation selon laquelle sa campagne électorale aurait été financée par Pablo Escobar, Alberto Fujimori se réfugie au Japon à l’occasion d’un voyage officiel, et annonce sa démission. Le Congrès péruvien la refuse et prononce sa déchéance politique pour « incapacité morale permanente » par 62 voix pour, 9 contre et 9 abstentions. Cette décision prive l’ancien président de ses droits civiques, ce qui lui interdit de se présenter aux élections suivantes.
La présidence d’Alejandro Toledo (2000-2006)
À l’issue de l’élection présidentielle de juin 2001, qui l’oppose à l’ancien président social-démocrate Alan Garcia, le candidat de centre gauche Alejandro Toledo accède à la magistrature suprême. Premier président indien du Pérou, issu du peuple, Alejandro Toledo est un économiste renommé, consultant auprès de diverses organisations internationales. Succédant à Alberto Fujimori, il incarne le retour à la démocratie et la volonté de mettre un terme à la corruption.
L’élection présidentielle destinée à désigner le successeur d’Alberto Fujimori se déroule en juin 2001. L’économiste Alejandro Toledo, candidat de « Pérou possible », recueille 53,08 p. 100 des suffrages, face à l’ancien président social-démocrate Alan García Pérez, candidat de l’Association pour la Révolution en Amérique latine (APRA), qui obtient 46,92 p. 100 des voix.
Centriste, âgé de 55 ans, Alejandro Toledo est un Indien d’origine quechua. Il incarne la réussite sociale d’un jeune cireur de chaussures parti de rien. Devenu docteur en économie des ressources humaines, il a travaillé pour la Banque mondiale, l’OCDE et l’Organisation internationale du travail, mais n’a pas d’expérience politique et ne dispose pas de la majorité au Congrès.
L’état d’urgence est décrété en juin 2002 à la suite de trois journées de manifestations qui font deux morts, organisées par la population d’Arequipa, la deuxième ville du pays, hostile à la privatisation de deux compagnies d’électricité. Au mois de juillet, le Premier ministre, Roberto Danino, et le ministre de l’Économie, fervents partisans d’une politique néolibérale, démissionnent. La popularité du président de la République chute rapidement et les élections régionales de novembre 2002 sont marquées par la victoire de l’opposition, incarnée par l’APRA. Alors que la croissance s’élève en 2002 à 5,2%, l’état d’urgence est à nouveau proclamé en mai 2003 à la suite d’un vaste mouvement de grève. Dans ce contexte, le Premier ministre Luis Solari présente la démission en bloc de son gouvernement au mois de juin suivant.
Une femme, Beatriz Merino, est alors nommée pour la première fois à la tête du gouvernement péruvien.
Elle doit faire face à une situation sociale et économique marquée par le fait que la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, mais elle est remplacée par Carlos Ferrero dès le mois de décembre 2003. L’instabilité et les scandales liés à la corruption continuent de miner la vie politique péruvienne, alors que le rapport de la commission Vérité et réconciliation qui enquête sur le sort des opposants politiques entre 1980 et 2000 est publié en août 2003. Il chiffre à 69 000 le nombre de disparus ou tués durant cette période. En août 2005, Pedro Pablo Kuczynski, jusqu’alors ministre de l’Économie et des Finances, devient Premier ministre à la suite de la démission de Carlos Ferrero, tandis que la côte de popularité d’Alejandro Toledo est au plus bas, inférieure à 10 p. 100.
Le retour au pouvoir d’Alan García
L’élection présidentielle de 2006 voit la victoire au mois de juin de l’ancien président Alan García, leader de l’Alliance populaire révolutionnaire américaine (APRA, social-démocrate), avec 52,6 p. 100 des voix. Même si son premier mandat, de 1985 à 1990, a laissé de mauvais souvenirs à la population, Alan García a bénéficié de son expérience face aux craintes suscitées par la candidature du nationaliste Ollanta Humala. En revanche, au Congrès, l’Union pour le Pérou (UPP), le parti d’Ollanta Humala, arrive en tête avec 45 sièges, devant l’APRA qui en obtient 36. Le nouveau président s’inscrit dans la lignée de pensée de Luis Inicio Lula da Silva au Brésil et Michelle Bachelet au Chili et entend œuvrer à un rapprochement avec le Chili notamment, par l’établissement d’un traité de libre-échange avec ce pays.