Toute une histoire pour un chapeau des Australes ! Les fibres végétales résistent mal à l’usure du temps, c’est pourquoi, on retrouve peu d’objets tressés des époques antérieures à l’ère moderne.
Un chapeau Polynésien
L’activité de tressage est étroitement liée à l’histoire des polynésiens. Ainsi, les parures de chefs, les ornements des grands prêtres, les vêtements et quantité d’objets utiles à la vie quotidienne, étaient constituées de fibres tressées.
C’est dans l’archipel des Australes, situé à l’extrême sud de la Polynésie française que l’activité de tressage est resté la plus vivante. Signe de distinction sociale ou objet de parure, le chapeau en est probablement le plus beau symbole. Les artisans de l’archipel rivalisent de dextérité et de créativité pour confectionner les chapeaux en matières végétales de toutes sortes.
La plus connue et la plus utilisée est la feuille de pandanus séchée. Cet arbuste pousse dans des sols peu fertiles et est cultivé en abondance dans la petite île de Rimatara. Les racines aériennes du pandanus, après traitement, contiennent également une fibre très utile aux artisans, appelée le ure fara. Le cocotier, célébré pour la richesse de ses utilisations, assure aux artisans tresseurs, quantité de fibres nécessaires à leur activité. On y trouve la bourre de coco, dont on tire le nape permettant de tisser de solides cordes ; les palmes qui produisent le niau utilisée de manière brute ou plus élaborée (niau blanc) et enfin la fibre naturelle entourant les pieds de cocotier appelé kere haari.
Mais l’ingéniosité des artisans des Australes se dévoile à leur capacité à transformer quantité d’autres matières végétales en fibres à tresser. Ainsi, les mama artisanes confectionnent des chapeaux en tige de mautini ou potiron, de purau dont le nom scientifique est l’hibiscus tillaceus. Dans l’île à Rapa, la plus éloignée de l’archipel, on affectionne la composition de chapeaux en aeho ou kakae, roseau de montagne pouvant atteindre 3 mètres de haut. Le bambou, le plantain de montagne ou fei, le piri piri contiennent également des fibres que les artisans utilisent habilement dans l’activité de tressage.
Les mama des Australes arborent fièrement leurs magnifiques chapeaux aux grandes occasions ou à la messe du dimanche. Si les textures, les formes, les couleurs varient, toutes ces coiffures reflètent un savoir-faire unique et légendaire. Ils mettent en valeur le talent exceptionnel de nos artisans tuhaa pae qui ont su faire de l’art du tressage une passion.
Chapeau et tressage du pandanus
On ne peut évoquer Rurutu et l’archipel des Australes sans parler du tressage, une activité qui rythme la vie de nombreuses femmes de l’île. La légende raconte que la vannerie prit son essor quand les femmes découvrirent la grotte de l’ogresse Ina qui avait recouvert tous ses murs de nattes tressées. Depuis ce jour-là, et émerveillées par les travaux de l’ogresse, les mamas de l’île prirent exemple sur ces tresses pour développer la vannerie actuelle.
De nombreuses associations artisanales sont organisées autour du tressage et presque tous les matins, les femmes de l’île se réunissent et tressent ensemble sacs, chapeaux, fleurs La plupart des pailles à chapeaux sont vendues, en bottes ou en rouleaux, au marché central de Papeete, facilitant un artisanat qui conserve toute sa vigueur grâce en particulier aux Églises protestantes où le chapeau fait partie de la tradition.
Toutes fêtes, toutes manifestations laïques ou religieuses sont prétextes au port de la coiffure et les groupes de chanteuses sont nombreux à s’exhiber chapeautés et revêtus des non moins traditionnelles et colorées robes mamaruau pour le plus grand plaisir des yeux.