Couche de glace, la banquise se forme par congélation lorsque la température superficielle de l’eau des mers et des océans s’abaisse à – 2 °C.
Géographie de la Banquise
La banquise permanente couvre 5 millions de km2 au centre de l’océan Arctique ; elle dérive dans le sens cyclonique à la vitesse de 1 à 2 km par jour. Plate et lisse près du pôle Nord, elle se fragmente en radeaux de glace, les floes, en été. Elle est épaisse de 1 à 4 m (13 m au maximum). À la périphérie, sa surface est hérissée de blocs de glace poussés les uns contre les autres lors des tempêtes. La banquise permanente cerne l’Antarctique sur une largeur moyenne de 100 km ; en hiver, la banquise saisonnière s’étend presque jusqu’au soixantième parallèle sous forme d’un pack discontinu.
Dans l’Arctique, une banquise côtière (pied de glace) adhère au littoral dès l’automne ; une crevasse la sépare de la banquise saisonnière qui se soude à la banquise permanente.
En 1882, des morceaux de l’épave d’un bateau américain, broyé par la banquise dans le détroit de Béring, sont retrouvés sur la côte sud-ouest du Groenland. Ce fait, pour Fridtjof Nansen, confirme l’existence d’un courant de dérive transpolaire. Il met alors au point un projet insensé : se faire prendre dans les glaces de la banquise avec un bateau suffisamment résistant, pour ensuite se laisser dériver vers le Groenland — et le pôle Nord. Le Fram quitte le port d’Oslo le 23 juin 1893. Le 13 octobre commence le premier hivernage. « Nous voici exposés, écrit Nansen dans son journal de bord, publié sous forme de récit en 1897, à ces terribles pressions auxquelles les prophètes de mauvais augure ont prédit que nous succomberions. »
[…] Les pressions, affectant une étendue importante de la banquise, sont dans une étroite relation avec le phénomène des marées. Deux fois par jour la banquise subit une détente, puis une compression. La compression se produit de quatre à six heures du matin, et à pareille heure le soir ; dans l’intervalle, la détente donne naissance à des plaques d’eau libre. L’attaque terrible qui vient de se produire a été probablement déterminée par la marée de syzygie. La lune a commencé le 9 et précisément ce jour-là, vers midi, a eu lieu la première convulsion. Depuis, chaque jour, l’agitation de la glace commence à une heure de plus en plus tardive ; aujourd’hui elle survient à huit heures.Les pressions se produisent particulièrement aux époques de syzygies et se montrent plus violentes à la nouvelle lune qu’à la pleine lune. Durant les périodes intermédiaires, elles sont faibles ou même nulles. Ce phénomène ne se manifesta pas pendant toute la durée de notre dérive ; il fut particulièrement terrible le premier automne, dans le voisinage de la nappe libre, située au nord de la côte sibérienne, et la dernière année aux approches de l’Atlantique. Pendant notre traversée du bassin polaire, il fut moins fréquent et plus irrégulier.
Dans cette région, les pressions sont principalement dues à l’action du vent sur les banquises. Lorsque les énormes masses de glace de cette zone, entraînées par la dérive, rencontrent d’autres champs chassés par une brise ayant une direction différente de celle qui pousse les premières, les collisions, comme on le comprend, doivent être terribles.
Cette lutte des glaces les unes contre les autres est à coup sûr un spectacle extraordinaire. On se sent en présence de forces titanesques. Au début d’une grande pression, il semble que tout le globe doive être ébranlé par ces chocs. C’est d’abord comme un roulement de tremblement de terre très lointain, puis le bruit se rapproche et éclate en même temps sur différents points.
Les échos du grand désert neigeux, jusque-là silencieux, répètent ce mugissement en fracas de tonnerre…; les géants de la nature se préparent au combat. Partout la glace craque, se brise et s’empile en toross, et soudain vous vous trouvez au milieu de cette lutte effroyable. Tout grince et mugit, la glace frémit sous vos pas…, de tous côtés, d’effroyables convulsions. À travers une demi-obscurité, vous voyez les blocs monter en hautes crêtes et approcher en vagues menaçantes. Dans les collisions, des quartiers épais de 4 ou 5 mètres sont projetés en l’air, montent les uns au-dessus des autres ou tombent pulvérisés […]
Source : Nansen (Fridtjof), Vers le pôle, trad. par Charles Rabot Paris, Hoëbeke, 1996.
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