C’est à sa situation au point le plus septentrional du cours de la Loire et à la croisée de voies terrestres importantes (venant de Bourges, Limoges, Poitiers, Bordeaux, de Chartres, Paris, Sens, Tours) qu’Orléans doit son développement depuis la plus haute antiquité jusqu’au XVIIIe siècle.
Histoire d’Orléans
La ville d’Orléans est riche d’histoire ! À l’époque gauloise, sur le coteau (aujourd’hui entre la cathédrale et la Loire), Genabum est surtout, avec son port, son pont et un marché s’appuyant sur l’arrière-pays beauceron, l’emporium (la place de commerce avec des entrepôts) de la puissante tribu des Carnutes. En 52 av. J.-C., César prend et pille la ville pour venger le massacre des commerçants romains de Genabum.
Elle prend, dès la fin du IIe siècle, les limites qui resteront les siennes pendant un millénaire: de l’actuelle rue du Bourdon-Blanc à la rue Sainte-Catherine, avec pour limite nord la rue d’Escures. Sur la rive gauche, au sud, la tête de pont s’étend dans le lit actuel de la Loire. Au demeurant, les monuments mis en place vers le milieu du Ier siècle sont modestes: des thermes (au sud de la cathédrale), un forum et un temple (sous l’actuelle préfecture), le théâtre évoqué plus haut. La romanisation a laissé peu de vestiges monumentaux mais des traces urbaines très fortes: la rue de Bourgogne, ancienne voie de Sens à Tours, les rues de la Poterne et Parisis, le cardo, ont structuré, et structurent encore, le noyau urbain.
À la fin du IIIe siècle, la cité des Carnutes est divisée en deux, et la ville devient capitale de la civitas aurelianorum (d’où son nom actuel). Au IVe siècle, elle devient cité épiscopale et s’enferme dans une muraille encore visible sur les flancs est et nord du castrum (rue de la Tour-Neuve et face au transept nord de Sainte-Croix) et couvrant 25 hectares. Il faut attendre le XIVe siècle pour que le tracé de l’enceinte se modifie, englobant à l’ouest le bourg Dunois, puis le XVe siècle pour qu’à l’est les abbayes de Saint-Aignan et Saint-Euverte soient incluses dans la ville, et enfin le XVIe siècle pour que le mur soit reporté au nord, à la place des actuels boulevards.
Deux saints évêques marquent la fin de l’antiquité: saint Euverte, sous-diacre de l’église de Rome, qui passe — sans doute à tort — pour avoir fondé la cathédrale Sainte-Croix, et saint Aignan, qui sut obtenir l’aide d’Aetius en 451 pour repousser les Huns d’Attila.
Au cours de la seconde moitié du Ve siècle, Orléans est un enjeu militaire et matériel. En 498, Clovis prend la ville. Il y convoque, en 511, le premier concile tenu en France. Les rapports entre la royauté et l’Église y sont fixés. Après la mort de Clovis, Orléans donne son nom au royaume de Clodomir, puis à celui de Gontran, avant d’être rattachée à la Neustrie par Clotaire II en 613. Elle y occupe une place un peu marginale.
Évêques et rois Orléanais
Avec la présence de grands évêques comme Théodulphe (783-818), familier de Charlemagne, Jonas (818-843) ou Agius (843-868), Orléans et sa région réapparaissent comme un foyer actif: les abbayes de Micy, de Saint-Aignan, mais surtout celle de Fleury à Saint-Benoît, ont un rayonnement considérable. Les séjours fréquents des souverains carolingiens ou le sacre de Charles le Chauve comme roi de la Francie occidentale, à Orléans en 848, en témoignent largement.
Hugues Capet, issu des Robertiens, comtes d’Orléans, fait sacrer roi son fils Robert le Pieux, le 25 décembre 987, en la cathédrale Sainte-Croix. Le comté est alors rattaché à la couronne, et le destin politique de la cité scellé. Robert le Pieux marque son attachement à la ville (où il était né vers 972) par de nombreuses fondations, par autant de reconstructions après le terrible incendie de 989, et par la construction de Saint-Aignan, dédicacée en 1029.
À cette époque, la ville est toujours resserrée dans le castrum dont le quart nord-est est occupé par la cathédrale et son cloître. Dans le quart opposé, au sud-ouest, le Châtelet royal — qui s’appuie sur l’angle de l’enceinte — surveille le pont et les marchés. À l’extérieur, autour du sanctuaire de Notre-Dame-des-Miracles, le bourg Saint-Paul, ou Dunois, développe une activité commerciale et artisanale servie par l’arrivée des routes de Chartres et Paris.
Robert le Pieux marque aussi la ville de son autorité, mais en fait Orléans subit la tutelle royale sans bénéficier des avantages d’une vraie capitale; ce n’est qu’en 1385 qu’un pouvoir municipal est reconnu.
Orléans n’est pas cependant sans influence au plan national. Un arrière-pays assez favorisé (laine des moutons de Sologne, bois et chasse de la forêt d’Orléans — même si la forêt éloigne des ressources de la Beauce —, la réputation de son vin et le commerce à grande distance en font un centre important). Son influence est aussi due à la tradition intellectuelle; celle-ci, ancrée par l’œuvre scolaire de Théodulphe, s’affirme dès le XIe siècle pour trouver son épanouissement dans ce que l’on appelle la «renaissance» du XIIe siècle.
L’essor du droit civil à Orléans doit sans doute son origine à sa tradition érudite, tout autant qu’à l’interdiction faite en 1219 par le pape Honorius III de l’enseigner à Paris. Ainsi, les trois quarts des légistes au service du roi au XIIIe siècle avaient étudié à Orléans. En 1306, le pape Clément V, ancien élève du studium orléanais, confère à ce dernier le rang d’université; sa réputation devient dès lors internationale.
La guerre de Cent Ans et la pucelle d’Orléans
Les troubles de la guerre de Cent Ans se font sentir dès 1358. En octobre 1428, Salisbury met le siège devant Orléans. Toutes les églises situées à l’extérieur de l’enceinte sont détruites préventivement, avec les maisons des faubourgs, pour éviter que l’ennemi ne s’y retranche. Les Anglais construisent des bastilles autour de la ville.
Jeanne d’Arc, venant de Chinon et contournant la ville par le sud, fait son entrée par la porte Bourgogne le 29 avril 1429. Le 5 mai, la bastille anglaise de Saint-Loup est prise. Le 6, l’armée royale, après avoir traversé la Loire sur un pont de bateaux, reprend, dans une contre-attaque menée par Jeanne et La Hire, le couvent des Augustins qui protégeait le fort des Tourelles. Le 7 mai, l’assaut est donné contre le fort qui, bloquant le pont, coupait Orléans de la rive gauche. La Pucelle d’Orléans, blessée par une flèche anglaise, continue le combat. Une fois le fort enlevé et une arche du pont (qui avait été détruite) rétablie, Jeanne rentre dans la ville dans la soirée du 7. Le lendemain, les troupes anglaises oui tenaient encore les bastilles de l’ouest lèvent le siège. À compter de ce moment, les Anglais ne cesseront de reculer.
Les aménagements de la Renaissance dans la ville d’Orléans
Louis XI fait fortifier le quartier canonial de Saint-Aignan, situé jusque-là à l’extérieur de l’enceinte. En 1481, le duc Louis obtient de Charles VIII la construction de la dernière enceinte dont le tracé reprend, bien au-delà des espaces urbanisés, la position des bastilles anglaises. L’ensemble n’est achevé qu’en 1566. Les 130 hectares ainsi délimités seront progressivement lotis. Sous Louis XII, fils de Charles d’Orléans, devenu roi de France en 1498, le duché est rattaché à la couronne.
Outre la reconstruction des faubourgs et de leurs églises, le XVIe siècle voit la construction de nombreuses maisons et d’hôtels particuliers en centre-ville. La seconde moitié du XVIe siècle voit ainsi s’épanouir, plus que partout ailleurs l’architecture civile de la Renaissance classique. Jacques Androuet Du Cerceau participe activement à cet essor. Il séjourne à Orléans de 1548 à 1552 et y fait paraître ses ouvrages sur l’architecture antique, qui sont les premiers livres d’architecture publiés en France.
La capitale protestante
L’université d’Orléans, par son humanisme, prépare les esprits à l’influence réformée, même si les professeurs les plus en vue, comme Pierre de l’Estoile, ne sont pas hérétiques. On rappellera que Jean Calvin y passa sa licence de droit. En 1561, on annexe à la faculté de droit une faculté de théologie protestante. À cette période sont liés les noms de Théodore de Bèze et d’Étienne Dolet.
La prééminence protestante ne dure qu’une dizaine d’années. Condé fait d’Orléans une place forte, que le duc de Guise vient assiéger. En 1567, Condé reprend possession de la ville, et la tension augmente, comme en témoignent les atteintes aux églises. On fait sauter la cathédrale, dont seules restent debout les chapelles rayonnantes du chœur et deux travées de la nef. Les représailles populaires sont violentes et Charles IX reprend en main le pouvoir municipal. À l’été 1572, les protestants orléanais subissent de terribles massacres et perdent toute influence. Orléans prend ensuite le parti de la Ligue. En 1594, Henri IV vient en personne assiéger la ville qui se soumet. Un des premiers gestes politiques nationaux du roi sera de financer la reconstruction de Sainte-Croix.
Au début du XVIIe siècle, les ordres de la Contre-Réforme s’installent dans les espaces libres de la dernière enceinte.
L’apogée du commerce orléanais
Aux activités traditionnelles de tannerie et de bonneterie s’ajoute à partir du milieu du XVIIe siècle le raffinage du sucre de canne. Les raffineries (plus de vingt-cinq) produisent un sucre réputé le meilleur du royaume, et développent nombre de métiers annexes. Elles assurent surtout des profits considérables liés, entre autres, à des avantages fiscaux. Le Martroi et les entrepôts organisent un commerce international. Le percement de la rue Royale, l’ordonnancement de la place du Martroi et la construction du pont, l’arasement des îles de Loire dont les terres servent à établir l’avenue Dauphine (opérations qui durent de 1751 à 1760) participent de ce mouvement.
La structure de cette économie est cependant fragile, étant très sensible aux grands heurts internationaux, qu’il s’agisse, pour le sucre, de la perte des Antilles (1763), ou, à la même époque, de la perte du Canada, débouché très important pour les industries textiles orléanaises.
Au début du XIXe siècle, Orléans, devenue chef-lieu du département du Loiret, figure parmi les six villes les plus riches de France. Mais, tout au long du XIXe siècle, elle traverse une phase léthargique: déclin du commerce des îles et de ses deux grandes industries, le sucre et le drap; déclin de la marine de la Loire que n’enraye pas la mise en service de bateaux à vapeur; rendez-vous manqué avec le chemin de fer, qui arrive en 1843, mais qu’on ne sait pas utiliser comme substitut de la Loire. Le rejet de la gare à plusieurs kilomètres au nord pour n’accepter qu’un débarcadère en cul-de-sac sera un lourd handicap. Les fortunes s’investissent dans la terre solognote et surtout beauceronne. Le début du siècle voit pourtant l’achèvement de la cathédrale (1829) et le percement de la rue Jeanne-d’Arc (1840). À la fin du siècle, la démolition de l’ancien Châtelet et de son quartier fait place aux halles, que le percement de la rue de la République ne relie qu’imparfaitement à la gare. Les mails enferment encore l’essentiel de la population, mais l’habitat gagne un peu au nord-ouest, à partir des années 1880, vers la place Dunois et le boulevard de Châteaudun.
Les produits maraîchers et horticoles constituent une part importante des revenus orléanais. La méthode Pasteur de fabrication du vinaigre fonde la prospérité des établissements Dessaux qui marient habilement cette mutation technologique et l’image de marque de la tradition. Les fabriques de couvertures de laine connaissent un sursaut d’activité lors de la guerre de 1914-1918. Des usines repliées se maintiendront et reconstitueront un certaine base industrielle à la ville.
De la Seconde Guerre mondiale à la reconstruction
La Seconde Guerre mondiale a cruellement marqué Orléans. Les bombardements des 15 et 16 juin 1940 ont détruit 17 hectares du centre historique: tout le quartier Saint-Paul et la rue Royale sont rasés; ne subsistent dans ce vaste champ de ruines que la façade de la Chancellerie (XVIIIe siècle), place du Martroi, et le sanctuaire de Notre-Dame-des-Miracles dans l’église Saint-Paul. En mai 1943, les Américains bombardent le quartier de la gare et la gare de triage des Aubrais. Orléans est libérée le 16 août 1944 par l’armée Patton.
Ces destructions massives ont entraîné un ambitieux programme d’urbanisme, conçu à partir de 1940 par l’architecte Jean Royer. La reconstruction transforme le visage du centre. La rue Royale, perspective du XVIIIe siècle, qui relie la place du Martroi à la Loire, retrouve son style initial et ses arcades. La rue Bannier est le théâtre d’une expérience technique innovante, la préfabrication. Globalement, les quartiers centraux détruits par les bombardements de 1940 et 1944 sont reconstruits en respectant la trame urbaine traditionnelle.
En 1962, Orléans retrouve son rang de ville universitaire. Le campus s’installe au domaine de La Source, dans un vaste complexe qui accueille des unités décentralisées du Centre national de la recherche scientifique (1966), le bureau de recherches géologiques et minières (1964), de l’Institut de la recherche agronomique, ainsi qu’une ville nouvelle. Les conserveries de légumes se restructurent. Les établissements du secteur tertiaire — banques, sociétés d’assurances, caisses de retraite — et les secteurs administratifs de grandes entreprises telles qu’IBM opèrent leur décentralisation en quittant Paris pour l’agglomération. Les magasins dits de «grande surface» accompagnent ce mouvement.
Parmi les travaux d’envergure qui ont affecté la ville, il faut noter en 1981 la réorganisation des abords de la cathédrale avec la construction de l’hôtel de Région, du musée des Beaux-Arts et du nouvel hôtel de ville. En 1988, un projet est enfin adopté pour l’aménagement du quartier de la gare: un pôle d’activités à dominante commerciale autour d’un hypermarché s’installe en plein centre-ville. Un vaste plateau piétonnier surplombant la voirie crée une continuité avec la rue de la République. Celle-ci, pourvue de larges trottoirs, conduit à la place du Martroi, elle-même aménagée pour les piétons.
Arts etTourisme à Orléans
Le vieil Orléans est riche en maisons des XVe et XVIe siècles, dont celle dite «d’Androuet Du Cerceau», logis Renaissance de la seconde moitié du XVIe siècle, est le plus bel exemple.
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De l’église Saint-Aignan construite par Robert le Pieux au XIe siècle, seule subsiste la crypte (chapiteaux inspirés par les modèles antiques, qui figurent parmi les plus anciens de la sculpture romane). L’église du XIe siècle, détruite par les Orléanais eux-mêmes pour éviter que les Anglais ne s’y retranchent, fut reconstruite par Charles VII au XVe siècle mais de nouveau ravagée lors des guerres de Religion; il n’en subsiste que le chœur et les transepts.
la cathédrale Sainte-Croix
La cathédrale Sainte-Croix est un rare exemple de grand édifice gothique construit aux XVIIe et XVIIIe siècles; elle ne fut achevée qu’en 1829. La cathédrale primitive, édifiée au VIIe siècle, fut détruite par un incendie en 989 et remplacée par un important édifice qui ne fut achevé qu’au XIIe siècle : c’est là que se déroulèrent les sacres des rois Charles le Chauve, Eudes, Robert le Pieux et Louis le Gros. En 1278, l’évêque Robert de Courtenay projeta une reconstruction complète, inspirée de la cathédrale d’Amiens. Les travaux débutèrent en 1287; le chœur fut achevé en 1329; l’œuvre, interrompue par la guerre de Cent Ans, reprit avec la construction du transept (1473-1504) puis de la nef; mais, en 1568, les huguenots firent sauter les piliers du transept, ce qui entraîna l’écroulement de la plus grande partie du chœur et d’une partie de la nef. Le 18 avril 1601, Henri IV et Catherine de Médicis posèrent la première pierre de la reconstruction, qui se fit selon les schémas de l’architecture gothique.
Musée des Beaux-Arts à Orléans
Le musée des Beaux-Arts d’Orléans conserve, outre de nombreux chefs-d’œuvres des écoles italienne, espagnole et hollandaise (Sainte Famille, du Corrège, Portrait d’homme, du Tintoret, l’Apôtre saint Thomas, œuvre de jeunesse de Vélasquez, …), de remarquables collections des écoles françaises des XVIIe et XVIIIe siècles et un exceptionnel cabinet de pastels (Autoportrait aux bésicles, de Chardin (1773), Portrait d’un jeune homme noir, de Maurice Quentin de La Tour, …). Les collections comprennent également un chef-d’œuvre de Gauguin, la Fête Gloanec, tableau capital peint en 1888 à Pont-Aven, et des sculptures de Rodin et de Zadkine.